Museum Henri LECOQ/ département de botanique
Un herbier est une collection de plantes séchées conservées entre des feuilles de papier. C'est à Luca Ghini (1490-1566), médecin et professeur de botanique à Bologne, qu'est attribuée l' « invention » de l'herbier vers 1550. Jusqu'à cette époque la botanique était une activité d'intérêt médical. Cette innovation lui permet de s'affranchir de la médecine et de devenir une science de l'observation.
Au XVIe siècle on ne parlait pas encore d'herbier mais de jardin sec, hortus siccus ou de jardin d'hiver, hortus hyemale. C'est seulement au XVIIIe siècle que le mot herbier fut employé pour désigner une telle collection.
DE LA COLLECTE AU CLASSEMENT
Tout commence par l’herborisation, sortie sur le terrain au cours de laquelle on récolte des plantes, si possible entières (tige, feuilles, fleurs et racines). Elle est suivie de la détermination: trouver le nom scientifique à l'aide d' ouvrages spécialisés, appelés Flores, et d'appareils comme la loupe binoculaire.
Ensuite vient le séchage : les plantes sont étalées en position naturelle, placées entre des feuilles de papier absorbant puis pressées. Toute l’eau de la plante doit disparaître pour assurer une bonne conservation de l’herbier.
Lorsque les plantes sont totalement déshydratées, on les fixe par des bandelettes de papier gommé sur des feuilles de papier, c’est l’attachage. Dans des herbiers anciens on trouve des plantes cousues sur le papier, maintenues par des épingles ou insérées dans de fines incisions du papier.
Puis on appose une étiquette mentionnant le nom de la plante, sa date et son lieu de récolte, le nom du récolteur. L'ensemble, plante et étiquette avec ses données, constitue une part d'herbier.
Enfin il convient de classer des plantes selon les familles, genres et espèces.
Gardé à l’abri de l’humidité et régulièrement traité contre les insectes, un herbier se conservera très longtemps : ainsi au Muséum national d’Histoire naturelle de Paris, certains datent du XVe siècle.
Les collections du Muséum Henri-Lecoq
Le muséum Henri-Lecoq abrite un peu plus de 100000 parts d’herbier, images de 200 ans de botanique, la planche la plus ancienne datant de 1790. Ce sont des plantes de France et d’Europe. On y trouve des algues, des mousses, des lichens, des fougères, et des plantes à fleurs (dont les arbres) mais aussi des champignons autrefois considérés comme végétaux.
Henri Lecoq (1802-1871)
Pharmacien, directeur du jardin botanique et du muséum de la Ville de Clermont-Ferrand, il fut le premier professeur de la chaire d’Histoire naturelle de l'Université clermontoise.
Son herbier est constitué de ses propres collectes (Nord, Massif central, Alpes, Provence et Corse) auxquelles s’ajoutent celles envoyées par des correspondants et/ou amis botanistes comme Mougeot (Vosges), Renou (Nantes) ou Nylander (Finlande). Lecoq a aussi acquis les herbiers de Fleurot (Dijon) et de Prost (Mende). Toute la flore française y est donc présente, ainsi qu'une bonne part de la flore européenne.
Cette collection a servi de base à Lecoq pour réaliser son « Catalogue raisonné des plantes vasculaires du plateau central de la France », en collaboration avec Martial Lamotte (1848) ainsi qu’un ouvrage en neuf volumes « Etudes sur la géographie botanique de l’Europe et en particulier sur la végétation du plateau central de la France » (1854).
Louis Brévière (1846-1912)
Louis Brévière était Conservateur des Hypothèques à Ambert. En 1923, sa veuve fait don au musée de l’herbier de son mari. Il est constitué de plantes Phanérogames d’Auvergne (5000 échantillons) récoltées entre 1870 et 1905, très bien préparées, souvent une en fleur et une en fruits.
Plus remarquable est son herbier de Cryptogames qui lui n’a pas été mélangé à celui de Lecoq : Cryptogames d’Europe et d’Algérie (1017 parts réunies en 21 fascicules) et surtout les Cryptogames d’Auvergne (2814 parts réunies en 54 fascicules) qui renferme Algues, Lichens et Bryophytes.
Eugène Jordan de Puyfol (1827-1891)
Originaire de Dôle dans le Jura, c’est à la suite de son mariage qu’il se fixe en Auvergne. Il fut maire de Raulhac(15) et juge de paix à Mur de Barez (12). En quarante ans d'herborisations il se constituera un herbier personnel, actuellement conservé au Muséum des Volcans à Aurillac, ainsi qu'un herbier de « doubles » dans lequel certaines espèces, récoltées le même jour et dans la même station sont présentes par dizaines. On appelle ces lots destinés aux échanges des centuries. C’est ce second herbier (187 liasses) qui a rejoint le musée Lecoq.
Frère Anthelme (1840-1909)
Le frère Anthelme, de son vrai nom Pierre Legay, natif de Mazayes (63), était un frère mariste. Enseignant passionné par la botanique et les sciences naturelles, il était en relation avec des personnalités scientifiques comme Héribaud.
Son herbier, parvenu au musée en 1993, est formé de 16 paquets (2179 parts) de plantes bien préparées, localisées, identifiées et datées. Elles proviennent du Rhône, de la Loire, de l’Ardèche, du Puy-de-Dôme et des Alpes.
Le Frère Anthelme avait constitué plusieurs herbiers à des fins pédagogiques dans chaque établissement où il a enseigné ; celui du musée est sans doute l’un de ceux-ci.
Charles de Parades de la Plaigne (1778- ?)
Originaire de Riom il fit une carrière militaire jusqu’en 1834. De retour en Auvergne, il devient maire de Marsat (63) en 1838. Il réalisa son herbier entre 1820 et 1830 avec des plantes de Corse et de la côte méditerranéenne française alors qu’il était en garnison à Ajaccio et à Toulon. La collection, constituée de 41 boîtes contenant environ 2000 parts, a été donnée au musée en 1996.
Féodor Jelenc (1911-2001)
Professeur de Sciences naturelles et brillant bryologue, il a réalisé une étude complète de la flore bryologique nord-africaine. Revenu en France, il a constitué, de 1965 à 1990, un herbier de mousses et hépatiques françaises comportant 13191 parts réparties en 127 boîtes. Il a aussi réuni en 63 liasses la plupart des phanérogames de la flore française.
UTILISATION DES HERBIERS
La constitution d’herbiers a toujours été la base de travail des botanistes. Ces collections issues de leurs récoltes et de nombreux échanges sont un outil de recherche pour l'identification des plantes, permettant de leur donner un nom et de les répertorier suivant une classification hiérarchisée.
De cette fonction principale, découlent de nombreuses utilisations dans différents domaines des sciences végétales : phytothérapie, agronomie et production végétale, écologie, cartographie des habitats et inventaires floristiques, paléobotanique …
Les localités d'espèces, mentionnées sur les étiquettes, permettent de connaître la répartition territoriale des plantes, et notamment d'espèces aujourd'hui menacées; un herbier est donc un fournisseur d'informations dans une optique de conservation de la flore.
C'est aussi une banque de gènes qui peut être utilisée pour des recherches en biologie moléculaire.
Enfin, un herbier peut aussi intéresser d'autres disciplines comme l'histoire (herbiers de personnages célèbres), la linguistique ou la paléographie.
Depuis quelques années, les collections d'Histoire naturelle, et les Herbiers en particulier, connaissent un regain d'intérêt, compte-tenu notamment de l'augmentation de la demande d'informations en matière d'environnement. Modernisés, accessibles, correctement gérés, en relation avec un réseau vivant de spécialistes et de chercheurs, ces herbiers pourront remplir efficacement leur rôle dans la connaissance et la protection de la nature. Dans cette perspective, le muséum Henri-Lecoq a prévu la mise en ligne des données de ses herbiers, via le GBIF (Global Biodiversity Information Facility), base de données internationale.